BIOGAPHIE DE L'AUTEUR

Beaumarchais (Pierre-Augustin Caron de)
1732 - 18 mai 1799

Pierre-Augustin Caron, fils d'horloger, inventeur à vingt ans d'un échappement de montre dont il est obligé de disputer l'invention au célèbre horloger Lepaute, vit sa vie comme un roman picaresque. Tour à tour musicien, auteur dramatique, éditeur, courtisan, agent secret, homme d'affaires, trafiquant quand il ne négocie pas ouvertement, il occupe des charges à la cour, apprend les finances avec Pâris-Duverney, mène conjointement plusieurs procès (familiaux, financiers, politiques...), se mêle de politique étrangère, qu'il s'agisse de la mission secrète à Londres avec le Chevalier d'Éon en 1775, de l'aide aux Insurgents d'Amérique en 1776, ou de l'achat de fusils en Hollande pour l'armée républicaine, en 1792. Il prend, dès 1756, le nom de Beaumarchais, du nom d'une terre de sa première épouse, bâtit sa fortune sur des coups de poker, organise l'exploitation de la forêt de Chinon, entreprend à Kehl l'édition monumentale des Œuvres de Voltaire (1783 - 1790), finance la Compagnie des Eaux, se bat sur tous les fronts, intrépide, dénonçant çà et là les privilèges, toujours la plume à la main, instrument de combat, de séduction, qu'il manie avec éloquence et insolence.

Il entre en littérature par la petite porte, fournit à Lenormant d'Étiolles, mari de la Pompadour, des Parades dans le genre poissard (1757 - 1763). Le théâtre l'intéresse cependant d'une manière plus sérieuse, et, suivant les idées développées par Diderot sur le drame bourgeois, il donne à la Comédie-Française Eugénie (1767), demi-échec suivi de la publication d'un ouvrage théorique, Essai sur le genre dramatique sérieux, et les Deux Amis (1770), échec total.

Changeant de genre, Beaumarchais projette de donner aux Comédiens italiens qui le refusent, le Barbier de Séville, un opéra-comique. Après aménagements, et tandis que Beaumarchais se débat dans un procès contre le juge Goëzman, la Comédie-Française reçoit en 1773 la comédie du Barbier de Séville, finalement créée en 1775. Le succès n'est pas immédiat. La pièce est coupée et ramenée de 5 à 4 actes, dès la seconde représentation. Une longue série de représentations victorieuses s'ouvre alors. Tout en méditant une suite à l'histoire de son Figaro, Beaumarchais prend la tête des auteurs dramatiques trop longtemps abusés par les Comédiens-Français, qui profitent de leur monopole pour ne pas rétribuer les auteurs comme il conviendrait. D'un conflit mené tambour battant par Beaumarchais, exigeant des comptes exacts, et peu avare en déclarations tonitruantes, naît la Société des auteurs dramatiques (1777 - 1780). Dès 1781, la Folle journée ou le Mariage de Figaro est reçue par les Comédiens-Français, mais la censure et les réticences de Louis XVI, qui a senti ce qu'il y a de subversif dans cette comédie brillante, en retardent la création. Beaumarchais multiplie les lectures privées, obtient la protection de la reine Marie-Antoinette, et la pièce est enfin créée, le 27 avril 1784, remportant le plus grand triomphe de toute l'histoire de la Comédie-Française. Plus de cent représentations en quatre ans (dont 67 en 1784 — un record —) asseoient la réputation littéraire de Beaumarchais, qui, pourtant, n'échappe ni aux pamphlets ni même à la Bastille. Ne négligeant aucun genre, il donne en 1787 le livret d'un opéra, Tarare, dont la musique est confiée à Salieri. Des affaires plus ou moins claires, la construction d'une somptueuse demeure dans le quartier de la Bastille, discréditent un peu, au début de la révolution, le défenseur des opprimés, le champion de la tolérance. Le germe est néanmoins semé, et, à travers les comédies de Beaumarchais, c'est l'émergence des libertés bourgeoises et populaires qui se fait jour, dans un monde où l'aristocratie, naguère incontestée, vacille au contact des idées philosophiques.

Le dernier volet de la trilogie de Figaro, la Mère coupable, drame larmoyant et moralisateur contaminé par l'atmosphère révolutionnaire, est créé en 1792 au Théâtre du Marais, dont Beaumarchais est le directeur occulte. Il faut attendre la reprise de 1797, au Théâtre Feydeau, avec les créateurs du Mariage de Figaro, Louise Contat et Dazincourt, rescapés des geôles de la Terreur, pour que la pièce remporte un véritable succès.

Entretemps Beaumarchais, confondu avec les aristocrates émigrés, a connu la prison, l'exil et la ruine. Il ne renonce cependant pas à se défendre, et publie de nombreux Mémoires. Presque oublié, il meurt en 1799.

Brillant, dilettante, insolent, impécunieux et intrigant, Beaumarchais est, à l'image de Figaro, « ambitieux par vanité, laborieux par nécessité, mais paresseux... avec délices ! orateur selon le danger ; poète par délassement ; musicien par occasion... » et ce qui reste de son œuvre, dramatique ou polémique, est essentiellement cette étonnante liberté d'esprit, qui ne vieillit pas, car elle est de tous les temps.

Si les Comédiens-Français eurent à pâtir de sa vigoureuse défense des intérêts des auteurs dramatiques, ils lui doivent quelques-unes des plus belles heures de gloire de leur histoire. Jamais le succès du Barbier de Séville et du Mariage de Figaro ne s'est démenti. Des dialogues étincelants, des quiproquos réjouissants, des morceaux de bravoure, des rôles en or, toutes ces qualités valent à Beaumarchais une bonne place dans le palmarès des auteurs joués, malgré le nombre réduit des pièces a u répertoire. Le succès de la reprise en série de la trilogie de Figaro dans les années 1989 - 1991 n'a fait que confirmer son éternelle jeunesse.

FIN